Sujet du TIPE : Supraconductivité, mesure des grandeurs caractéristiques d’un supraconducteur


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 Table des matières :

  1. Introduction 
  2. Qu'est-ce que la supraconductivité
    Grandeurs caractéristiques d'un supraconducteur
    Découverte de la supraconductivité
  3. Mesure des grandeurs caractéristiques 
  4. Mesure de la température critique grâce à la sonde à quatre points
    Détermination de la température critique grâce à l'effet Meissner
    Détermination du champ magnétique critique et de la densité de courant critique
    Mesure du temps de stockage de l'énergie par un supraconducteur
  5. Explications de la supraconductivité 
  6. Mouvement des électrons pour un métal non supraconducteur
    Théorie BCS
    dc Josephson Effect
  7. Chronologie 

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I Introduction

 

a) Qu’est-ce que la supraconductivité ?

- La supraconductivité est un phénomène qui a lieu à des températures très basses et pour lequel un métal perd toute résistance électrique.

Les courants électriques peuvent donc circuler à travers un métal sans aucune dissipation d’énergie.

- Un courant peut ainsi circuler indéfiniment dans un circuit, du moment que ce circuit reste à une température inférieure à la température de transition (température en dessous de laquelle le matériau est supraconducteur).

La plupart des températures de transition sont entre 1K et 10K au dessus du zéro absolu. Mais depuis 1986 , des matériaux ayant des températures de transition plus élevées ont été trouvés.

Image Copyright 1997, Colorado Superconductor, Inc.

- Aux températures ordinaires, les métaux ont une certaine résistance au flux des électrons, du à la vibration des atomes. A mesure que la température baisse, les atomes vibrent moins et la résistance décline lentement jusqu'à la température critique. A cette température la résistance tombe à zéro.

 

b)grandeurs caractéristiques d’un supraconducteur

Un matériau n’est supraconducteur que dans certaines conditions :

 

c)Découverte de la supraconductivité

- La supraconductivité a été découverte en 1911 aux Pays-Bas par H.Kamerlingh Onnes.

- A l’époque, on savait que les métaux ont une résistivité qui décroit de façon pratiquement linéaire avec la température, jusque vers une vingtaine de kelvins.

- Onnes s’est rendu compte en refroidissant le mercure à très basse température que celui-ci passe brusquement dans un état où il n’offre plus aucune résistance au passage du courant électrique. Cette transition se manifeste par une chute très brutale de la résistivité.

 

II Mesure des grandeurs caractéristiques

 

1) Mesure de la température critique grâce à la sonde à 4 points

 

a)utilisation du thermocouple

 

- Pour mesurer des températures allant de celle de la pièce à celle de l’azote liquide, on peut utiliser des thermocouples (les thermomètres sophistiqués n’opèrent pas sur un tel domaine de température).

-Un thermocouple consiste à relier deux métaux non similaires. En effet, si deux fils de nature différente sont reliés à leurs extrémités et qu'une extrémité est maintenue à une plus haute température que l'autre, une différence de tension apparaît et un courant électrique circule entre les jonctions froide et chaude. Dans un thermocouple, la jonction d'un fil électrique est maintenue à une température de référence (par exemple, dans un bain glacé), l'autre jonction étant placée à l'endroit où la température doit être mesurée.

 

L’apparition d’une force électromotrice est du à l'effet Seebeck : dans un circuit ouvert constitué de deux conducteurs différents, lorsque les jonctions sont à des températures différentes :

le coefficient a12 est appelé le pouvoir thermoélectrique  existant entre les conducteurs 1 et 2.

 

 

 

 

 

Type de thermocouple  Domaine d'utilisation (K) 
Cuivre/constantan 

Fer/constantan 

Chromel/alumel 

Chromel/constantan 

Or-fer/chromel 

Or-fer/argent normal

100-650 

100-1100 

100-1500 

100-1100 

1-300 

1-30 

 

 

 

 

 

b) sonde à 4 points

 

Quand une mesure de résistance électrique d’un échantillon de test est réalisée en y attachant deux fils, on mesure également la résistance du point de contact aux fils à l’échantillon. Typiquement la résistance du point de contact est beaucoup plus faible que celle de l’échantillon. Cependant, quand on mesure une très petite résistance, notamment sous des conditions de températures variables, la résistance de contact peut dominer et complètement cacher des changements de résistance de l’échantillon lui-même. C’est ce qui se passe pour les supraconducteurs.

Les effets de résistance au point de contact peuvent être éliminés en utilisant une sonde à 4 points.

Image Copyright 1997, Colorado Superconductor, Inc.

c) Mesure

La température critique est obtenue pendant la mesure de la résistance électrique en fonction de la température du supraconducteur, mesurée grâce à un thermocouple (en réalité on mesure la tension au borne du supraconducteur).

Image Copyright 1997, Colorado Superconductor, Inc.

S’il s’agit d’un supraconducteur à haute température (plus de 77K), on plonge le supraconducteur dans l’azote liquide. Il devient alors supraconducteur et sa résistance est nulle.

On retire le supraconducteur de l’azote liquide. La température mesurée par le thermocouple augmente progressivement jusqu‘à ce que le matériau cesse d’être supraconducteur (la tension aux bornes du supraconducteur n’est plus nulle). La température à laquelle il cesse d’être supraconducteur est la température critique.

 

d) Résultats

Image Copyright 1997, Colorado Superconductor, Inc.

 

2) Détermination de la température critique grâce à l’effet Meissner

 

a) Principe de l’effet Meissner

 

Si l’on applique un champs magnétique à une substance supraconductrice à température T >Tc, les lignes d’induction pénètrent dans l’échantillon. Si l’on refroidit progressivement cette substance, les lignes d’induction sont brutalement expulsées de la masse, à une certaine température Tc.

Le supraconducteur fait cela en créant des courants de surface qui produisent un champ magnétique qui contrecarre le champ extérieur.

Les supraconducteurs sont donc des diamagnétiques parfaits. Cet effet, découvert par Meissner et Ochsenfeld, se manifeste de manière différente dans les supraconducteurs de type I et de type II :

- dans un supraconducteur de type I, les lignes d’induction magnétique B sont exclues du supraconducteur dès que T devient inférieur à Tc.

On a :

avec

B champ magnétique

M aimantation

Mu0 perméabilité du vide

L’aimantation est donc égale et opposée au champ appliqué H.

Lorsque l’on fait décroitre la température d’une telle substance, des supercourants naissent dès que l’on traverse la température critique; ces supercourants produisent une aimantation M s’opposant exactement à H dans le volume du supraconducteur.

Seule une extension d’extension (profondeur de pénétration) au voisinage de la surface, est pénétrée par les lignes d’induction.

Le faible champ critique de ces superconducteurs de type I les rend impropres à une utilisation pratique.

 
B induction magnétique                     r abscisse perpendiculairement à B 

H champ magnétique appliqué 

M aimantation 

a) ligne d'induction magnétique à T>Tc, H¹ 0 : elles pénètrent la masse de l'anneau supraconducteur 

b) ligne d'induction magnétique à T<Tc, H¹ 0 : elles sont exclues de la masse 

c) lignes d'induction à T<Tc,H=0 : lorsqu'on supprime le champ appliqué, les lignes restent embrassées par l'anneau 

d) métal normal de faible susceptibilité magnétique : les lignes d'induction pénètrent la masse 

e) supraconducteur de type I: les lignes d'induction ne pénètrent que sur une profondeur l 

f) supraconducteur de type II: ce supraconducteur est formé d'aiguilles supraconductrices (S) séparées par des régions normales (N). La profondeur de pénétration est supérieure au diamètre des aiguilles 

g) supraconducteur de type I: aimantation 

h) supraconducteur de type II: aimantation. La supraconducteur conserve ses propriétés jusqu'à Hc2>>Hc1

Lignes d'induction magnétique et aimantation dans les supraconducteurs

 

- Dans un supraconducteur de type II, les phénomènes sont identiques à ceux qui se produisent dans un supraconducteur de première espèce, tant que H<Hc1; lorsque H est compris entre Hc1 et Hc2, la substance conserve ses propriétés supraconductrices, mais les lignes d’induction magnétique pénètrent progressivement dans l’échantillon.

Dans cet état mixte, des aiguilles supraconductrices (cependant pénétrées par le champ magnétique sur une profondeur ) sont séparées par des régions normales.

Les aiguilles court-circuitent les régions normales et la substance reste supraconductrice jusqu’à la valeur Hc2 du champ appliqué.

Les supraconducteurs de ce type, alliages ou métaux ayant une forte résistivité à l’état normal, ont des champs critiques Hc2 élevés, ce qui en fait des matériaux de choix pour les utilisations pratiques.

 

b)Application de l’effet Meissner : Lévitation d’un aimant au dessus d’un supraconducteur

Le champ induit repousse la source du champ appliqué, et va par conséquent repousser l’aimant associé avec ce champ. Cela implique que si un aimant est placé au dessus d’un supraconducteur quand le supraconducteur est au dessus de sa température critique, puis que l’on refroidit ce supraconducteur en dessous de Tc, le supraconducteur va alors repousser le champ magnétique de l’aimant. L’aimant lui-même est alors repoussé et lévite au dessus du supraconducteur. Pour que cette expérience soit une réussite, la force de répulsion doit excéder le poids de l’aimant.

Image Copyright 1997, Colorado Superconductor, Inc.

Remarque :

L'aimant qui lévite reste au dessus du supraconducteur (de type II, il n'en est pas de même du supraconducteur de type I). Cet équilibre est une manifestation du "flux pinning". Certaines lignes de champ de l'aimant ont pénétrées le supraconducteur et le "retiennent".

c) Mesure de la température critique en utilisant l’effet Meissner

On immerge le thermocouple et le supraconducteur dans l’azote liquide, puis on retire le supraconducteur de l’azote liquide. On place alors un aimant au dessus du supraconducteur.

Il va léviter au dessus de celui-ci jusqu’à ce que la température repasse au dessus de la température critique.

Donc lorsque l’aimant tombe sur le supraconducteur, la température indiquée par le thermocouple (relié à un voltmètre) est la température critique Tc.

 

Pour une mesure plus précise, il faut attendre que l’aimant soit retombé complètement sur le supraconducteur et mesurer la température de la partie basse du supraconducteur.

En effet, la surface haute du supraconducteur se réchauffe en premier et perd sa supraconductivité à mesure que l’azote liquide s’évapore. Les autres parties du supraconducteur sont encore à une température en dessous de Tc et continue donc à repousser l’aimant. Cependant, puisque ces parties sont plus éloignées, il lévite moins. A mesure que le supraconducteur se réchauffe, l’aimant lévite de plus en plus bas jusqu’à ce que le bas du supraconducteur soit à une température supérieure à Tc et à ce moment, l’aimant tombe à la surface du supraconducteur

Donc lorsque l’aimant est sur le supraconducteur, la partie basse du disque supraconducteur est à la température critique.

 

3) Détermination du champ magnétique critique et de la densité de courant critique

 

a)Détermination du champ magnétique critique Hc2

Pour cette expérience, on a besoin d’une bobine. La valeur du champ peut être obtenu en connaissant la géométrie de la bobine et le courant passant à travers celle-ci.

Mettre la sonde à 4 points immergée dans de l’azote liquide.

Augmentez graduellement le courant de façon à augmenter le champ magnétique à travers le supraconducteur. La valeur de V23 augmentera de façon abrupte à un certain champ magnétique appliqué. Cette valeur est du champ magnétique est le champ magnétique critique haut Hc2 pour le supraconducteur considéré à la température de l’azote liquide 77 K.

La valeur du champ magnétique critique Hc2 peut être obtenue à d’autres températures soit en plaçant le supraconducteur dans un cryostat pendant l’expérience, soit en enlevant le supraconducteur de l’azote liquide et en mesurant la sortie du thermocouple en même temps que Hc2.

(La température critique baisse à mesure que l’on augmente le champ magnétique)

 

Image Copyright 1997, Colorado Superconductor, Inc.

 

Autre expérience : Lorsqu’on approche un aimant d’un supraconducteur, la valeur de V23 augmentera lentement. Ce phénomène pourrait potentiellement être utilisé pour construire un détecteur de champ magnétique à base de supraconducteur.

 

b) Détermination de la densité de courant critique

Lorsque le champ est supérieur au champ critique, le flux pénètre dans le matériau, qui cesse alors d’être supraconducteur. Ce champ magnétique, susceptible de faire cesser la supraconductivité, peut être extérieur au supraconducteur ou être produit par le courant électrique qui y circule. Or puisque tout champ magnétique créé par un courant est proportionnel à l’intensité de ce dernier, il existe donc une limite à l’intensité du courant qui peut parcourir un supraconducteur; elle est directement liée à la valeur du champ magnétique critique.

 

Théoriquement on peut mesurer la densité de courant critique Jc de la sonde immergée dans l’azote liquide en augmentant le courant appliqué I14 jusqu'à une transition à un état non supraconducteur. Mais en pratique, cette procédure endommagerait la sonde de façon permanente

On mesure la température critique pour différentes intensités.

Plus l’intensité est importante, plus la température critique est faible (donc le matériau devient supraconducteur à une température plus faible)

Image Copyright 1997, Colorado Superconductor, Inc.

 

 

Composé  Tc(K) Hc(T)* ou Hc2(T)
Al* 1,2 0,01
Pb* 7,2 0.08
Nb 9,2 0.32
NbTi 10 11
PbMo6S8 13 55
YBa2Cu3O7 90 >200
Bi2Si2Ca2Cu3O10 110 >200

Températures critiques de composés supraconducteurs. Les matériaux de première espèce sont signalés par un astérisque.

 

 

 

4) Mesure du temps de stockage de l’énergie par un supraconducteur

La base de cette expérience est un tore supraconducteur. Un courant peut être induit dans le tore et du fait de sa nature supraconductrice, le courant peut potentiellement persister pendant un temps extrêmement long.

 

On utilisera un gaussmeter pour avoir la précision nécessaire à notre expérience.

On induit un courant dans le tore. Le tore avec son courant persistant devra alors être stocké dans de l’azote liquide durant une période de plusieurs semaines. Le courant dans le tore est mesuré à intervalle régulier durant cette période.

Si les résultats des mesures du courant électrique dans le tore étaient affichés en fonction du temps, on verrait que le courant décroît de façon exponentielle en suivant la relation :

e-(R/L)t=F

où R est la résistance électrique du tore, L l’inductance du tore et F la fraction du courant qui reste présent au temps t.

 

 

 

 

III Explications de la supraconductivité

 

1) Mouvement des électrons pour un métal non supraconducteur

Les atomes forment une structure vibrante : plus le métal est chaud, plus il vibre.

Les électrons entrent en collision avec de petites impuretés ou des imperfections dans la structure. Quand les électrons rencontrent ces obstacles, ils "rebondissent" dans toutes les directions et perdent de l'énergie sous forme de chaleur.

 

 

2) Théorie BCS

 

Lorsqu’il se déplace, un électron modifie légèrement la position des ions situés sur son parcours. Ces distorsions, nommées phonons, créent de petites zones positives qui attirent l’autre électron de la paire.

Le mécanisme des phonons, une fois inclus dans la théorie BCS, explique parfaitement la supraconduction des matériaux classiques.

J Bardeen a proposé une analogie pour expliquer la mobilité des paires de Cooper : ces dernières sont comme de petits groupes de personnes accrochées les unes aux autres dans une foule dense. Une telle foule en mouvement est difficile à arrêter car, pour arrêter une personne, il faut briser l ‘élan de tout un groupe.

 

Toutefois plusieurs équipes pensent que l’échange de phonons entre les électrons d’une paire de Cooper n’explique pas l’appariement dans les oxydes de cuivre à haute température : dans les supraconducteurs de température critique élevée, les interactions des électrons et des phonons devraient être si fortes qu’elles déformeraient la structure du matériau et lui feraient perdre sa supraconductivité, voire sa conductivité.

En outre, la théorie BCS suppose que l’énergie des électrons est supérieure à celle des phonons. Comme les électrons se déplacent plus vite que les phonons, le premier électron est loin de l’ion qu’il a déplacé lorsque le second électron arrive. La distance ainsi introduite entre les électrons réduit leur répulsion mutuelle. Dans les cuprates, au contraire, électrons et phonons auraient des vitesses voisines, ce qui réduirait la distance entre les électrons.

 

3) dc Josephson Effect

Des effets nouveaux apparaissent si on couple faiblement deux supraconducteurs. Cela peut être fait, par exemple, en séparant deux supraconducteurs par une barrière très mince d'oxyde non conducteur.

 

Les paires de Cooper peuvent alors passer d'un supraconducteur à l'autre par effet tunnel, un processus purement quantique. La barrière ou jonction tunnel ne se comporte donc pas comme un isolant mais bel et bien comme un supraconducteur.

 

 

 

Les conditions critiques pour ce courant sont très différentes : les courants critiques sont en général très faibles, ce qui permet de basculer facilement la jonction de son état supraconducteur vers un état très résistif.

 

Applications des supraconducteurs

- L'électricité pourrait être stockée dans des circuits supraconducteurs pendant de longues périodes sans perte significative

(Dans une des expériences de Onnes, un courant circula à travers une boucle de fil de plomb refroidi à 4K. Un an après le courant circulait toujours dans le circuit sans perte significative)

- boucliers magnétiques (grâce à l'effet Meissner)

- Des prototypes de train à lévitation ont été construits au Japon en utilisant des aimants supraconducteurs.

- Les jonctions Josephson ont des applications en électronique (pour l'informatique)

 

Appendice (chronologie)

1911 Le physicien hollandais Heike Kamerlingh Onnes découvre la supraconductivité dans le mercure à la température de 4K 

 

1913 Kamerlingh Onnes reçoit le prix Nobel de Physique pour sa recherche sur les propriétés de la matière à basse température 

 

1933 W. Meissner et R.Ochsenfeld découvre l'effet Meissner
1941 Supraconductivité à 16K
1953 Supraconductivité à 17.5K
1972 John Bardeen, Leon Cooper, John Schrieffer recoivent le prix Nobel de physique pour la première théorie sur le fonctionnement des supraconducteurs
1986 Les chercheurs d'IBM Alex Müller et Georg Bednorz fabrique un supraconducteur à 35K
1987 Découverte d'un supraconducteur à 92K, ce qui rend possible l'utilisation de l'hydrogène liquide
1988 Découverte d'un supraconducteur à 125K
1993 Découverte d'un supraconducteur à 133K

 
 


Dernière modification : 24/09/99

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